Série « Elles ont désobéi : Portraits de femmes libres au XIXe siècle »
« Je suis née sous une étoile rebelle. » — Rosa Bonheur
À une époque où les femmes n’ont pas le droit d’exister en dehors du foyer, Rosa Bonheur peint, expose, choisit sa vie, son apparence et ses amours. Elle obtient une autorisation préfectorale pour porter le pantalon, vit avec une femme, dirige son atelier, et conquiert les plus hautes sphères de l’art sans jamais demander la permission. Son œuvre comme sa vie sont un manifeste éclatant : la liberté n’a pas de sexe.
Contexte historique : naître femme au XIXe siècle
Au XIXe siècle, les femmes sont privées de droits fondamentaux : pas d’accès aux écoles d’art officielles, pas de signature légale sur leurs œuvres, pas de reconnaissance institutionnelle. La peinture animalière de grand format, genre noble et exigeant, est réservée aux hommes. Rosa Bonheur va y inscrire son nom en lettres majuscules.
Une vie à rebours : Rosa, l’enfant indocile devenue maître-peintre
Née en 1822 à Bordeaux dans une famille d’artistes saint-simoniens, Rosa Bonheur grandit dans un environnement progressiste. Très tôt fascinée par les animaux, elle les observe avec une précision quasi scientifique. Elle apprend sur le terrain : foires agricoles, abattoirs, écuries, et même l’école vétérinaire d’Alfort.
En 1849, elle expose Le Labourage nivernais, une fresque monumentale du travail paysan. Puis, en 1853, Le Marché aux chevaux, toile magistrale présentée à Paris puis à Londres, la consacre comme peintre de renommée internationale. Une femme qui vit de son art, seule, indépendante : une révolution silencieuse.
Peindre les bêtes pour échapper aux cages sociales
Rosa Bonheur choisit la peinture animalière, alors marginale. Elle en fait un terrain d’excellence, un domaine de liberté. Ses œuvres se distinguent par leur réalisme puissant, leur précision anatomique et leur force émotionnelle.
Quelques œuvres majeures
- Le Labourage nivernais (1849)
- Le Marché aux chevaux (1853)
- La Fenaison en Auvergne (1855)
La désobéissance comme art de vivre
Rosa Bonheur transgresse toutes les normes de son époque :
- 🎨 Elle peint de grandes scènes rurales, terrain masculin par excellence
- 🧑🤝🧑 Elle vit quarante ans avec Nathalie Micas, puis avec Anna Klumpke
- 👖 Elle obtient un « permis de travestissement » pour porter pantalon et bottes
- ✊ Elle refuse le mariage et toute soumission aux codes bourgeois
- 🐴 Elle reste fidèle à un art rural, sans concession au goût bourgeois
En 1865, elle devient la première femme artiste à recevoir la Légion d’honneur, remise par l’impératrice Eugénie.
Ce qu’elle nous lègue : un modèle de liberté
« Mon indépendance est mon bien le plus précieux. »
« Je n’ai jamais rien attendu que de moi-même. »
Rosa Bonheur a fait de sa vie un acte de résistance artistique et personnelle. Elle nous parle encore aujourd’hui parce qu’elle a osé créer, aimer, choisir, sans discours militant mais avec courage et constance.
Une féministe avant le mot, une désobéissante joyeuse et farouche.
📚 Pour aller plus loin
- 🎧 Podcast – France Culture : Rosa Bonheur, peintre animalière et rebelle
- 📘 Rosa Bonheur par Anna Klumpke (1898), biographie intime
- 🎥 Documentaire – ARTE : Rosa Bonheur, dame nature
- 🏰 Visitez son château-musée à Thomery
Rosa Bonheur n’a pas seulement peint des chevaux au galop : elle a galopé elle-même, libre, puissante, indomptée. Une artiste à admirer, une femme à redécouvrir.
